• Richard Millet et l'exorcisme médiatique

    Quoi de mieux, pour animer toutes les rentrées (scolaire, littéraire, sociale...), qu'un petit scandale ? En 2012, ce par Richard Millet qu'il arrive.

    N'ayant pas lu l'éloge incriminé, ni aucun livre de l'auteur d'ailleurs, je garderai mon jugement. D'autant plus que la curée qui commence incite nécessairement à ne pas hurler avec les loups mais, au contraire, à temporiser.

    Les interventions médiatiques de Richard Millet confirment qu'il n'y a pas grande urgence, n'a-t-il pas publiquement condamné les crimes de Breivik ?

    Ce qui est fappant c'est que les media n'ont pas pour rôle d'analyser ce qu'a bien pu vouloir faire Richard Millet. C'est assez net dans cette émission. Le but, lorsqu'il n'est pas de condamner, est plutôt d'exorcicer le trouble suscité, de rassurer, et de se rassurer, sur la conformité idéologique de l'auteur avec les frontières communes de l'acceptable. Êtes-vous masochiste ? Cherchez-vous à faire parler de vous ? Puisque l'on ne comprend pas la démarche (condamner Breivik et, pourtant, en faire un éloge). Êtes-vous raciste ? Êtes-vous d'extrême-Droite (l'ultime question posée) ? Tout est ramené à ces lignes rassurantes, montrant à quel point la question raciale occupe une place obsédante dans notre société. 

    Personnellement, puisque Richard Millet ne cesse de clamer qu'il n'est qu'écrivain, tout cela m'évoque la célèbre phrase d'André Breton, à lui reprochée par Albert Camus : « L'acte surréaliste le plus simple consiste, révolvers aux poings, à descendre dans la rue et à tirer au hasard, tant qu'on peu, dans la foule. » Certes, point de hasard chez Breivik, et un passage à l'acte, mais on voit bien que l'effroi inspire la littérature.

    Il y a néanmoins une chose qui me dérange d'emblée : le manque de pudeur. Publier un tel livre si peu de temps après la tragédie et le jour même de la fin du procès me semble peu compatible avec le respect élémentaire dû au deuil. Il faut de la décence et Richard Millet à beau jeu de s'étonner de la « haine » dont il est l'objet. Il est certain que les remous de cette affaire iront jusqu'en Norvège, certainement avec plus de simplisme encore qu'elle n'en provoque ici. Je juge quelque peu narcissique l'entreprise de Richard Millet.

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    À lire : les analyses de Pierre Assouline et de Jérôme Dupuis (et une entrevue) dont parle Richard Millet dans l'émission d'iTélé.


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