• L'extrait aléatoire #7 : flagrant délit de mystification

    Il est salutaire de mettre au jour les falsifications fréquentes qui permettent à la Gauche de se tailler les plus jolis costumes de pureté et d'innocence. L'Histoire est une discipline à la fois des plus nécessaires et aussi, pour cette raison, des plus sensibles. (Les notes sont de moi.)

    Le fait est que les hérauts des « deux France » sont moins naïfs qu'ils ne le paraissent. Ils admettent, certes de mauvaise grâce, qu'il y a eu de gens d'extrême-droite, voire des maurassiens antisémites dans la résistance. Ils connaissent les glissements qui ont conduit des gens de gauche vers le pétainisme et des antifascistes au nazisme. Ils considèrent cependant que ces cas, dont ils minimisent le nombre et la représentativité, ne sont pas de taille à remettre en question la validité de leur idée principale. La collaboration de gauche n'est pas masquée dans sa totalité, ce qui serait un peu fort, mails elle l'est dans sa nature (qu'on présente comme déviante, alors que la collaboration de droite est décrite comme naturelle) et dans son ampleur, qu'on réduit autant que possible par divers procédés. La méthode consiste à être scrupuleux à l'extrême dans le décompte des collaborateurs de gauche, mais emphatique et globalisateur dans le repérage des collaborateurs de droite¹. Plus générallement, un collaborateur venant des Croix-de-Feu n'échappera pas à son passé et sera stigmatisé, avec insistance, comme Croix-de-Feu. En revanche, un collaborateur venu du Parti radical ou du Parti socialiste perdra miraculeusement son indication d'origine : il sera étiqueté technocrâte sans âme, complice de Laval ou personnage redoutable et ambitieux. Un sophisme imparable  couvrira parfois le tout, présupposant que quiconque collabore, par le fait même qu'il collabore, est positionné à droite ou à l'extrême-droite².

    Simon Epstein, Les Dreyfusards sour l'Occupation, Albin Michel, 2001, pages 335-336

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    ¹ L'auteur, dans une note, donne l'exemple de Jean-Pierre Azéma qui, dans l'Histoire de l'extrême-droite en France, n'envisage parmi les collaborateurs que ceux qui étaient encore à Gauche en 1938, alors qu'il n'hésite pas à remonter plus avant pour les collaborateurs venant de la Droite.

    ² Une pratique qu'il faut bien dire habituelle : on reprochera toujours à un homme de droite un passé trop extrême, mais beaucoup plus rarement à un homme de gauche.


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